LE BETEL
La coutume de mâcher du bétel date du néolithique. Elle est pratiquée du monde indien jusqu’en Asie du Sud-Est. Elle constitue un point commun unique chez ces peuples si différents par leur langue, leur race et religion.
Dans la composition de la chique: la noix d’arec produite par une espèce de palmier, la feuille de bétel et la chaux qui peut être faite de coquillages broyés, certaines chiques contiennent du tabac. La nuit, on la laisse dans la bouche placée entre les gencives et la joue. Le bétel a joué un rôle official dans les cérémonies et les activités sociales.
En Inde, le bétel a été longtemps considéré comme un des huit plaisirs de la vie: l’onguent, l’encens, les femmes, la musique, la nourriture, les fleurs.
En Asie du Sud-Est, c’était un honneur de continuer à mâcher le bétel que le roi avait commencé à mâcher.
Autre ingrédient de la chique: le catechu qui est du résidu de décoction d’écorces d’acacia de couleur rouge-marron. C’est une pâte qui est étalée sur la feuille de bétel pratique courante en Inde. Haute concentration en tanin aux propriétés astringentes.
Les Indiens ont des mélanges très riches: Fenouil, turméric, safran, cumin, coriandre, clou de girofle, noix de muscade, gingembre, cardamome, graines de concombre, menthe, feuille d’argent.
Effets physiques du bétel : excite les glandes salivaires à cause de l’alcaloïde contenu dans la noix d’arec. L’huile de la feuille de bétel combinée avec ces alcaloïdes est responsable des effets euphoriques et provoque la même réaction que la nicotine. La nature alcaline est un agent digestif. Il neutralise l’excès d’acide. Le bétel est une sorte d’Alka-Seltzer. C’est la chaux éteinte en interaction avec le reste qui rend la salive rouge.
Propriétés : rend euphorique, stimulant tonique. Le bétel n’est pas nocif pour les dents si elles sont brossées régulièrement. Sinon il noircit les dents et cela est visible sur les squelettes datant de la préhistoire. Mais les Shan, les Akha de Birmanie et de Thaïlande étaient fiers d’avoir les dents noires “car tous les animaux ont les dents blanches”. Voir la coutume de se laquer les dents en noir.
Les premiers missionnaires qui ont introduit la chirurgie dentaire étaient obligés de fabriquer des fausses dents en ébène.
Le deuxième effet: la formation de la plaque de carbone de calcium provoque la pourriture de la dent.
Troisième effet: des fragments se coincent entre les dents, se décomposent et provoquent des maladies des gencives et une mauvaise odeur.
UTILISATION DANS LES CEREMONIES ET DANS LA SOCIETE
En Malaisie, une feuille de bétel était donnée à la sage-femme au 7ème mois de la grossesse et après l’accouchement, elle recevait tous les autres ingredients de la chique.
Si elle était douée de pouvoir divinatoire, elle pouvait jeter des morceaux de noix d’arec sur le sol pour déterminer le sexe de l’enfant. Après la naissance, elle crachait du jus de la chique sur l’enfant pour le protéger. En Birmanie, on disait qu’un enfant ne pourrait parler le birman que s’il savait mâcher du bétel. Le bétel se retrouvait dans toutes les cérémonies tel que la circoncision, le percement des oreilles, l’investiture du cordon sacré chez les brahmanes. Dans la cour avant le mariage aussi. Avant un mariage, le père de la mariée offre un plateau de feuilles de bétel aux parents. Accepter signifie accepter l’invitation. Idem pour les funérailles, mais les feuilles étaient tournées à l’envers.
BETEL A LA COUR
Le roi mâchait du bétel en public. Il arrivait qu’il en offre de son propre plateau et parfois de sa bouche comme une faveur. Un set à bétel était échangé entre rois d’Asie du Sud -Est . Le prince héritier de Thaïlande a reçu lors de son investiture une régalia de 21 pièces comprenant un set à bétel un crachoir tous deux richement décorés.
MAGIQUE ET POISON
Le poison était mélangé à la chaux, il était donc plus sage de toujours utiliser sa propre chaux. Au Sri Lanka, le poison le plus efficace était de l’huile de varan ou du venin de vipère. Le bétel était utilisé comme moyen pour y placer un aphrodisiaque ou philtre d’amour. Le Shah du Gujarat avait pris pour habitude de prendre des petites doses pour s’immuniser en cas de tentative d’assassinat, ce qui empoisonna son haleine et sa peau. Sa méthode pour exécuter les nobles disgraciés était de mâcher, puis de cracher du jus de sa chique sur eux provoquant la mort. Malheureusement, sa respiration eut les mêmes effets sur ses concubines et elles ne dormaient du fait qu’une seule nuit avec lui.
Réf : Betel cutters. Henry Brownrigg. Edition Thames & Hudson